En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Cantique de la prophétesse Anne
Jan Victors, 1619-1676/7, Anne la mère de Samuel en prière, 1643, Musée d’Utrecht
Jan Victors est un peintre néerlandais du siècle d’or ; élève de Rembrandt, il rejoignit son atelier vers 1635. Il réalisa des portraits, des scènes bibliques et des scènes de genre. Sa vie fut difficile, car il avait peu de succès, et il eut des activités parallèles, notamment celle de soigner les malades de la peste qui sévissait alors. Il mourut lors d’un voyage vers l’Inde où il était parti pour trouver une vie meilleure.
Il peint ici Anne, de manière bien réaliste et impressionnante, surprenante…. Jan Victors exprime ici sa relation privilégiée avec Dieu.
C’est une femme simple, exprimant son désespoir de ne pas avoir d’enfant. Elle vient prier Dieu de lui donner un fils et elle promet de le donner à Dieu pour le reste de sa vie.
A l’arrière dans l’ombre, le prêtre Eli l’observe et veut la calmer ; il lui assure que Dieu répondra à sa demande.
Anne aura un fils, Samuel et elle rendra grâce à Dieu avec le fameux cantique que nous lisons aujourd’hui.
La composition de la peinture est caractéristique de Jan Victors , il positionne son personnage dans une porte ou une fenêtre, comme l’a beaucoup fait Rembrandt à cette époque (« la jeune fille à la fenêtre » conservée au musée de Dulwich (Londres). Ainsi cet artifice place cette peinture entre le portrait et la scène de genre.
La lumière crue inonde le visage d’Anne encadré de cheveux longs défaits, les yeux et les mains supplient ; les vêtements de fourrure et les broderies de la robe prouvent une bonne technique picturale.
Le texte biblique
Et Anne fit cette prière : Mon cœur exulte à cause du Seigneur ; mon front s’est relevé grâce à mon Dieu ! Face à mes ennemis, s’ouvre ma bouche : oui, je me réjouis de ton salut !
Il n’est pas de Saint pareil au Seigneur. – Pas d’autre Dieu que toi ! Pas de Rocher pareil à notre Dieu !
Assez de paroles hautaines, pas d’insolence à la bouche. Le Seigneur est le Dieu qui sait, qui pèse nos actes.
L’arc des forts est brisé, mais le faible se revêt de vigueur.
Les plus comblés s’embauchent pour du pain, et les affamés se reposent. Quand la stérile enfante sept fois, la femme aux fils nombreux dépérit.
Le Seigneur fait mourir et vivre ; il fait descendre à l’abîme et en ramène.
le Seigneur rend pauvre et riche ; il abaisse et il élève.
De la poussière, il relève le faible, il retire le malheureux de la cendre pour qu’il siège parmi les princes, et reçoive un trône de gloire. Au Seigneur, les colonnes de la terre : sur elles, il a posé le monde.
Il veille sur les pas de ses fidèles, et les méchants périront dans les ténèbres. La force ne rend pas l’homme vainqueur :
les adversaires du Seigneur seront brisés. Le Très-Haut tonnera dans les cieux ; le Seigneur jugera la terre entière. Il donnera la puissance à son roi, il relèvera le front de son messie.
1 Sm 2
Commentaires
Ce cantique d’Anne est un cri d’allégresse reconnaissante qu’elle prononce envers le Seigneur, après beaucoup de souffrances.
Elle manifeste sa joie non pas à la naissance de Samuel, mais seulement après avoir accompli son vœu de le donner au Seigneur.
Ce morceau de poésie est certes circonstancié dans l’histoire d’Anne, mais l’horizon est largement élargi, il anticipe sous un mode prophétique, les événements qui vont du salut d’Anne à l’exaltation du roi messie.
Le Seigneur a « relevé » Anne comme il « élève » l’humilié et le pauvre, il « élèvera » la puissance de son messie.
Il exerce son jugement pour la confusion des arrogants.
Comme il l’a fait pour Anne, il renverse les destinées. Son action vise à protéger ses amis de ceux qui font le mal qu’il réduit à l’impuissance. Anne dévoile l’agir du Seigneur, sa logique : seront « élévés » Samuel, Saül, David et en dernier ressort tout le peuple d’Israël. La naissance de Samuel annonce un temps nouveau.
Ce cantique d’action de grâce sera repris par Marie, toute imprégné de l’Ecriture, dans son Magnificat.