En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Hérode, le renard
Les ruses de renard, bestiaire médiéval, Latin Animal Atlas, vers 1240. Bodleian Library, Oxford.
Le renard sert depuis toujours de symbole pour parler de l’hérésie. La ruse, la tromperie, l’ambiguïté sont apparues comme des traits caractéristiques de cet animal.
Plusieurs passages de la Bible le mettent en scène, tant dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau.
Dans le livre des Juges Samson capture trois cents renards, les attache par la queue deux par deux avec une torche allumée, les lâche dans les champs des Philistins (Jg 15). Dans le livre de Néhémie, Tobie l’Amonite soutient que le renard serait capable de renverser les murs de Jérusalem (Ne 3,35). Le livre des Lamentations évoque la montagne de Sion, dévastée et peuplée de renards (Lm 5,18), etc
Dans le Nouveau Testament Jésus fait mention des renards qui ont des tanières, à la différence du Fils de l’Homme qui n’a pas où appuyer sa tête, (Mt 8, 20 et Lc 9,58). Ici, averti de l’hostilité sournoise d’Hérode Antipas, il le compare à un renard.
Le renard apparaît comme le maître des lieux sauvages ; il introduit un élément de désordre et de destruction des espaces protégés. C’est un animal rusé : quand Jésus compare Hérode à un renard, il vise par là son esprit pervers et rusé.
Notre livre du 13e siècle montre un renard à la fourrure rouge brique. Il représente ainsi le plus perfide et le plus rusé des animaux. Le renard se couche par terre, fait semblant d’être mort.
Les oiseaux perdent leur vigilance et s’approchent de son cadavre. La bande dessinée se lit de bas en haut : le renard s’empare soudainement de l’un d’entre eux et part le dévorer.
Le texte biblique
À ce moment-là, quelques pharisiens s’approchèrent de Jésus pour lui dire : « Pars, va t’en d’ici : Hérode veut te tuer. »
Il leur répliqua : « Allez dire à ce renard : voici que j’expulse les démons et je fais des guérisons aujourd’hui et demain, et, le troisième jour, j’arrive au terme.
Mais il me faut continuer ma route aujourd’hui, demain et le jour suivant, car il ne convient pas qu’un prophète périsse en dehors de Jérusalem.
Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n’avez pas voulu !
Voici que votre Temple est abandonné à vous-mêmes. Je vous le déclare : vous ne me verrez plus jusqu’à ce que vienne le jour où vous direz : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !
Lc 13,31-35
Commentaires
Jésus et ses disciples s’approchent de Jérusalem
Jésus va révéler à ses interlocuteurs ce que le lecteur a appris à la Transfiguration : Jérusalem n’est pas seulement le but géographique de son voyage, mais aussi le lieu de sa passion, ville qui va causer sa mort.
Quelques pharisiens conseillent à Jésus de partir. Du point de vue humain le conseil est sage : Hérode Antipas, premier personnage de Galilée, a déjà fait décapiter Jean Baptiste.
Mais à cette sagesse humaine s’oppose le plan de salut divin.
Alors Jésus lance un oracle de malheur adressé directement à Jérusalem.
L’apostrophe initiale énumère les griefs : elle oppose les meurtres des envoyés divins dont se rend coupable la métropole d’Israël, aux efforts inlassables, mais vains, de Jésus. Lui, voulait rassembler ses enfants dispersés et les protéger contre le jugement divin qui menace.
L’oracle prophétique livre sa sanction : puisque le sang innocent, et en dernier lieu celui de Jésus, sera répandu, Dieu quittera Jérusalem et son temple et ainsi cessera de protéger son peuple.
Le jugement n’est pas l’effet d’un acte arbitraire de Dieu, mais la conséquence d’une résistance irréductible à l’offre de la grâce. Le destin de la ville ne découle pas d’une fatalité, il n’a pas été imposé, mais choisi : « votre temple est abandonné à vous-mêmes ».
Lors de son entrée à Jérusalem, Jésus, envoyé royal de Dieu, va être acclamé par la multitude de ses disciples avec les mots du psaume 117,26 « Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient », . (Lc 19, 38). Les assassins des prophètes, eux, attendront que reviennent l’Envoyé de Dieu sur les nuées : « Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire » (Lc 21,27) pour proférer cette acclamation.