En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Sainte Thérèse d’Avila, Demande de signes pour croire
Piero della Francesca, 1415-1492, rencontre de la reine de Saba et de Salomon, fresque de la légende de la vraie croix (selon Voragine) (1452-1466) dans l’église de San Francesco d’Arezzo.
En 1452, après la mort de Bicci di Lorenzo qui avait débuté les décors, Piero della Francesca reçoit la commande d’une série de fresques pour la chapelle principale du chœur de l’église San Francesco d’Arezzo en Toscane, dédiée à la légende de la vraie croix tirée de la légende dorée de Voragine. Ce thème appartenait traditionnellement au registre de l’iconographie franciscaine, et était très en vogue à l’époque de la Renaissance.
Il s’agit d’une légende remontant à l’évangile apocryphe de Nicodème : la Croix aurait été taillée dans un arbre ayant poussé sur la tombe d’Adam, traditionnellement localisée à Jérusalem, arbre ayant pour origine une graine semée dans la bouche d’Adam après sa mort. L’arbre est abattu sur ordre de Salomon, destiné d’abord à la construction du Temple et finalement affecté à celle du pont de Siloé. La reine de Saba, rendant visite à Salomon, s’agenouille devant cette poutre de bois avec la prémonition qu’il servira à fabriquer la croix de Jésus.
C’est ce passage, épisode II du cycle, que Pïero della Francesca représente dans cette fresque.
Deux épisodes sont représentés sur la même fresque, séparés par une colonne corinthienne du palais royal. L’arrivée de la reine de Saba et de son cortège devant le palais de Salomon et l’hommage rendu au roi.
A gauche la reine est agenouillée devant le pont au bord du petit fleuve de Siloe construit à partir de la poutre. Les suivantes, vêtues à la mode du quattrocento, ont un regard sévère, surveillent la reine l’air interrogatif.
À droite elle rend visite au roi dans son palais, que Piero construit selon les principes d’Alberti (1404-1472), grand architecte de la Renaissance. La reine de Saba s’agenouille devant Salomon. Elle porte un belle robe blanche et une fine coiffe transparente. Elle serre la main du roi mais ne le regarde pas. Le message de la reine est suggéré mais non visualisé, elle veut mettre à l’épreuve le roi. Salomon est entouré de ses conseillers qui font face aux suivantes de la reine ; celles-ci adoptent une allure altière, leurs profils sont fins, les sourcils épilés suivant la mode de l’époque mettant en évidence les têtes parfaitement sphériques, les cous ronds et allongés. Les regards sont noirs..
Piero della Francesca atteint ici l’apogée de son art, il s’affirme comme un précurseur de la Haute Renaissance. La composition est claire, la perspective géométrique est remarquablement employée. Piero fait preuve d’un sens de la couleur particulièrement subtil et montre un chromatisme délicat et clair.
Ces fresques ont été récemment restaurées (finies en 2000)
Le texte biblique
Comme la foule s’amassait, Jésus se mit à dire : « Cette génération est une génération mauvaise : elle demande un signe, mais en fait de signe il ne lui sera donné que celui de Jonas.
Car Jonas a été un signe pour les habitants de Ninive ; il en sera de même avec le Fils de l’homme pour cette génération.
Lors du Jugement, la reine de Saba se dressera en même temps que les hommes de cette génération, et elle les condamnera. En effet, elle est venue de l’extrémité du monde pour écouter la sagesse de Salomon, et il y a ici bien plus que Salomon.
Lors du Jugement, les habitants de Ninive se lèveront en même temps que cette génération, et ils la condamneront ; en effet, ils se sont convertis en réponse à la proclamation faite par Jonas, et il y a ici bien plus que Jonas.
Luc 11, 29-32
Commentaires
Jésus enseignait et les foules se pressaient en masse autour de lui. Elles demandent des signes pour authentifier sa mission. Mais Jésus refuse de donner les signes que ses auditeurs attendaient.
En fait Jésus leur dit qu’il a donné un signe, celui de Jonas, c’est à dire la conversion des païens de Ninive, et le signe a été donné « à cette génération », terme péjoratif qui sert à désigner à dénoncer l’incrédulité.
Jésus fait donc appel à la conversion et montre la supériorité des païens qui se sont repentis sur « cette génération mauvaise » qui ne croit pas et refuse de faire pénitence.
Comme souvent dans son enseignement Jésus renvoie aux Écritures, ici au prophète Jonas avec les habitants de Ninive et à la reine de Saba avec Salomon.
Le livre de Jonas montre le prophète qui commence par refuser d’obéir à la mission que Dieu lui a confiée ; il s’enfuit, mais fait naufrage et séjourne dans le ventre d’un poisson ; alors il vient à contre cœur prêcher la conversion à Ninive où vivait une des populations païennes les plus cruelles de l’Antiquité. Tous les habitants se convertirent. Mais Jésus sait que sa prédication n’aura pas le même effet que celle de Jonas.
Il veut aller plus loin. Jésus se réfère à la reine de Saba : d’abord elle ne croit pas ce qu’elle entend dire sur la sagesse du roi, fils de David, et vient pour le mettre à l’épreuve par des énigmes. Cette attitude initiale est celle de ceux qui réclament un signe à Jésus. Mais la reine ne tarde pas à confesser que Salomon surpasse en sagesse ce qu’elle avait entendu dire de lui.
C’est pourquoi Jésus annonce à ceux qui l’écoutent qu’ils seront condamnés par les païens eux-mêmes..
Le texte souligne l’universalisme du salut : les païens répondent mieux qu’Israël à l’invitation à se convertir. Indirectement Jésus se désigne comme celui qui est plus que Salomon et que Jonas, plus que le roi le plus sage, plus qu’un prophète. Mais ses auditeurs sauront-ils reconnaître en lui l’Envoyé de Dieu, le Fils ?