En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Envoi en mission
Albert Altdorfer (1480-1538), Communion des apôtres, 1516-1518, Musée de Berlin
Albert Altdorfer est un peintre et graveur allemand de l'époque de la Renaissance contemporain de Dürer.
Il fut l'un des premiers peintres européens à placer le paysage comme thème autonome au centre de son travail. Il entremêle les plans, les figures humaines et le décor. Son œuvre la plus connue est la bataille d'Alexandre de la Pinacothèque de Munich.
Ce tableau est caractéristique des premières œuvres de Altdorfer. La composition est empreinte d'un dynamisme étrangement expressif. Non seulement les personnages, mais aussi les rochers et les architectures, dont le délabrement souligne l'appartenance au règne végétal, semblent obéir aux lois de ce monde parfois tellement envahissant que les personnages paraissent étpouffés par la dense forêt.
Les deux personnages du premier plan sont pris dans un rocher qui semble faire partie de leur vêtement.
Les disciples sont nombreux à l'œuvre dans leur travail missionnaire. Ils sont attentifs aux personnes qu'ils rencontrent, soit en parlant avec conviction, gestes à l'appui, soit compatissants envers les indigents et les malades.
Le paysage est envahissant, il couvre les deux tiers de la peinture, Altdorfer est en fait le plus grand paysagiste de la peinture allemande ancienne, il semble que ce soit le sujet principal du tableau.
Mais les couleurs des vêtements ressortent sur l'ensemble des arbres et des rochers, ainsi l'activité missionnaire des disciples est mise en valeur.
Le texte biblique
Après cela, le Seigneur en désigna encore soixante-douze, et il les envoya deux par deux devant lui dans toutes les villes et localités où lui-même devait aller.
Il leur dit : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d'envoyer des ouvriers pour sa moisson.
Allez ! Je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups.
N'emportez ni argent, ni sac, ni sandales, et ne vous attardez pas en salutations sur la route.
Dans toute maison où vous entrerez, dites d'abord : 'Paix à cette maison.'
S'il y a là un ami de la paix, votre paix ira reposer sur lui ; sinon, elle reviendra sur vous.
Restez dans cette maison, mangeant et buvant ce que l'on vous servira ; car le travailleur mérite son salaire. Ne passez pas de maison en maison.
Dans toute ville où vous entrerez et où vous serez accueillis, mangez ce qu'on vous offrira.
Là, guérissez les malades, et dites aux habitants : 'Le règne de Dieu est tout proche de vous.,
Luc 10,1-9
Commentaires
Cet envoi en mission est tout autre que celui que Luc présente au chapitre précédent. Il s'agit maintenant de montrer que les disciples qui annoncent Jésus parlent en son nom et à sa place.
Luc veut montrer le lien profond entre Jésus révélé comme le Fils et ceux qui l'annoncent.
Les conseils prodigués aux 72 reprennent ce que Luc avait pour les 12 (Lc 9,1-6). mais ici pour la première fois Jésus désigne ce qui est annoncé comme la venue imminente du Règne de Dieu.
Considérons d'abord le choix du nombre 72 : c'est le chiffre des nations dans la Septante de Genèse 10, 2-31, la descendance des fils de Noé, la table des 72 peuples de la terre. Luc a clairement le souci de manifester que la mission est celle de toute l'Église et pas uniquement de quelques personnes. Les chrétiens issus des nations païennes évangélisées ont les mêmes devoirs pour ce qui est de la mission, que ceux des disciples qui ont suivi Jésus durant sa vie terrestre. C'est donc comme Seigneur ressuscité que Jésus les envoie deux par deux. Ce chiffre non plus n'est pas dit au hasard mais rappelle la phrase du Deutéronome « toute parole est fondée sur la bouche de deux ou trois témoins (Dt 19,15). Dans les Actes Luc parle de groupe de deux missionnaires, Paul et Barnabé, Barnabé et Marc, Paul et Silas…
Jésus commence par une invitation à prier le Maitre de la moisson pour qu'il augmente le nombre des missionnaires. La moisson est traditionnellement une métaphore du jugement divin et les moissonneurs représentent Dieu et ses anges. Mais la moisson ici est la mission et ce sont les disciples qui moissonnent. La tâche est immense et seul Dieu peut y pourvoir.
Puis vient une série de consignes de Jésus relatives aux envoyés, aux maisons, aux villes.
La première consigne est de ne pas s'encombrer, de ne pas perdre de temps en longues salutations sur la route (on connait les habitudes orientales!). La même consigne avait été donnée par Élisée à son serviteur (2 R4,29). Plutôt que de s'adresser aux individus rencontrés, ce sont les maisonnées et les villes qu'il faut atteindre. Cela peut se comprendre étant donné l'urgence de la mission et surtout la difficulté de la situation : les disciples sont des agneaux au milieu des loups.
En arrivant sur le lieu de la mission, Jésus demande à ses envoyés de souhaiter la paix à la maisonnée qui les accueille : c'est la paix messianique qui doit être souhaitée, la paix pour une plénitude de vie, celle associée au Salut. Elle est un don divin, que les disciples apportent dans la demeure où ils pénètrent. La paix sera autant pour les personnes réceptives à la Bonne Nouvelle que pour les missionnaires eux-mêmes.
La consigne concernant l'alimentation est importante , car pour les missionnaires en milieu païen, cela signifie l'abolition de la distinction entre nourriture pure et impure. Mais il est vrai aussi que le travailleur mérite son salaire. Paul le rappelle dans sa première lettre aux Corinthiens (1 Co 9,14).
Ainsi « Le Règne de Dieu est tout proche de vous », et cela se voit dans les guérisons effectués par les disciples. Leur tâche est en effet de guérir les malades et de proclamer le Règne de Dieu qui s'approche.