En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
L’Apocalypse
Hennequin de Bruges (1340-1400), tenture de l’Apocalypse, 1373, château d’Angers
Nous regardons la première pièce de la fameuse tenture de l’Apocalypse réalisée à la fin du 14e siècle sur la commande de Louis 1er d’Anjou à partir de cartons de Hennequin de Bruges, connu également sous le nom de Jean de Bruges, pour illustrer le texte de l’Apocalypse. Le tissage de la tapisserie est confié aux ateliers parisiens de Nicolas Bataille.
Le dessinateur s’est inspiré de bibles enluminées du 13e siècle conservées à la librairie de Charles V.
La tenture est révélatrice de l’art pictural de la fin du Moyen Age, entre héritage de l’iconographie des siècles passés et réalisme de plus en plus prononcé dans le traitement des architectures et l’approche de la tridimensionnalité.
L’artiste a fait preuve d’une très grande originalité dans la conception de l’ensemble, dans la composition des tableaux, dans l’équilibre des personnages. Son art consommé se manifeste par la simplicité et la souplesse du dessin, par la recherche du contraste des formes et des couleurs.
Dans ce panneau des « sept églises », le grand personnage à gauche est saint Jean à Patmos. Il porte la main gauche à sa bouche: il annonce la Révélation contenue dans le livre qu’il porte dans sa main droite.
En face de lui les sept églises sont représentées matériellement par sept bâtiments et spirituellement par sept anges .
Les édifices ont une architecture identique et sobre, ce qui montre le parti pris pour l’ensemble des panneaux, de simplification et de clarté.
Et pourtant les anges ont des attitudes variées, vivantes et mouvementées.
Ils figurent les responsables des Eglises auxquels s’adresse Jean.
Le texte biblique
REVELATION DE JESUS CHRIST, que Dieu lui a confiée pour montrer à ses serviteurs ce qui doit bientôt advenir ; cette révélation, il l’a fait connaître à son serviteur Jean par l’envoi de son ange.
Jean atteste comme parole de Dieu et témoignage de Jésus Christ tout ce qu’il a vu.
Heureux celui qui lit, heureux ceux qui écoutent les paroles de la prophétie et gardent ce qui est écrit en elle, car le temps est proche.
Jean, aux sept Églises qui sont en Asie mineure: à vous, la grâce et la paix, de la part de Celui qui est, qui était et qui vient, de la part des sept esprits qui sont devant son trône,
À l’ange de l’Église qui est à Éphèse, écris: Ainsi parle celui qui tient les sept étoiles dans sa main droite, qui marche au milieu des sept chandeliers d’or :
Je connais tes actions, ta peine, ta persévérance, je sais que tu ne peux supporter les malfaisants; tu as mis à l’épreuve ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas ; tu as découvert qu’ils étaient menteurs.
Tu ne manques pas de persévérance, et tu as tant supporté pour mon nom, sans ménager ta peine.
Mais j’ai contre toi que ton premier amour, tu l’as abandonné.
Eh bien, rappelle-toi d’où tu es tombé, convertis-toi, reviens à tes premières actions
Ap 1, 1-4, 2,1-5a
Commentaires
En cette fin d’année liturgique, il nous est donné à lire le livre de l’Apocalypse.
Il commence par le mot « Révélation ». Tous les termes qui ont rapport à la révélation sont cités : montrer, faire connaître, Parole de Dieu, témoignage, paroles de prophétie.
Bien que dans notre vocabulaire courant, une apocalypse se rapporte à quelque chose d’obscur débouchant sur des catastrophes, étymologiquement, il s’agit d’un « dévoilement », d’une révélation visant à faire voir et entendre la Parole de Dieu, qui a pour visée le salut de l’humanité.
Ce livre est une lettre que l’auteur adresse aux sept Eglises qui sont en Asie Mineure.
Il les salue avec la formule bien attestée dans les en-têtes des lettres pauliniennes: grâce et paix exprimant la plénitude du salut, et confirmant la dimension de bonne nouvelle que l’auteur veut annoncer. Et cela de la part de « de Celui qui est, qui était et qui vient, de la part des sept esprits qui sont devant son trône », une formule qui rappelle la révélation de Dieu à Moïse, le fameux « je suis qui je serai » Ex 3,14.
Les sept esprits rappellent le texte d’Isaïe, les dons de l’Esprit qui repose sur le nouveau David (Is 11,2ss), et ils représentent ainsi la plénitude de l’Esprit souhaitée pour les Eglises.
Ces lettres, écrites aux sept Eglises d’Asie, soit la totalité des Eglises qui peuvent recevoir l’exhortation, donnent ainsi un ancrage historique au livre de l’Apocalypse.
Chacune de ces Eglises a ses traits propres, ses erreurs passées ou récentes, comme ses capacités à progresser.
L’auteur commence par l’Eglise d’Ephèse qu’il loue pour sa persévérance dans la persécution, son refus du mensonge et des fausses doctrines.
Il lui est cependant reproché sa tiédeur, l’affadissement de sa foi des premiers jours, la disparition de l’ardeur des néophytes : il lui faut revenir à la foi première, à l’amour ardent qui a permis aux chrétiens de se rassembler et d’œuvrer ensemble contre le mal, un amour qui doit être aussi fidélité dans les épreuves. L’auteur relance la prédication de Jésus, « convertis-toi », qui appelle à se remettre à son écoute et à sa suite.