En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Seigneur je ne suis pas digne …..
Paul Veronese (1528-1588), Le Christ et le centurion, vers 1571, musée du Prado, Madrid
Veronese est un des plus grands peintres vénitiens du 16e siècle. Il est connu pour ses extraordinaires qualités de coloriste et ses majestueuses décorations en trompe l’œil à fresque, à Venise notamment où il connut sa plus grande popularité. C’est en 1562/63 qu’il réalisa la plus célèbre de ses œuvres, les « Noces de Cana » (actuellement au Louvre), qui lui avait été commandée pour le réfectoire du monastère bénédictin sur l’île de San Giorgio Maggiore à Venise.
Dans ce tableau du centurion, Veronèse donne une grande ampleur, presque théâtrale, à ce fameux épisode de la guérison de l’esclave du centurion romain.
La scène se tient devant une architecture inspirée par l’architecte contemporain Andrea Palladio (1508-1580), toute blanche ce qui met en valeur les couleurs des personnages de la scène.
Veronèse raconte l’épisode de la guérison de l’esclave du centurion. Le tableau est composé de deux parties bien distinctes, d’un cöté Jésus avec un groupe de disciples et de curieux et de l’autre le centurion accompagné d’une somptueuse suite armée.
Les hallebardes pointent vers le ciel, débordent même l’espace de la toile. Les soldats à droite du tableau se prosternent en un mouvement qui culmine en la personne du fonctionnaire suppliant.
Le centurion est présenté tête nue, désarmé. Il s’agenouille humblement, ce qui contraste avec son splendide manteau de pourpre. Sa main droite montre le sol et sa main gauche est levée vers le ciel dont il reçoit toute la lumière. Il se reconnaît humble et demande l’aide au Seigneur.
Jésus, discrètement nimbé de lumière, se penche vers le centurion qui demande la vie pour son esclave. Il le regarde intensément, il tend sa main vers celle du centurion.
Derrière Jésus est présent Pierre qui se penche aussi vers le soldat, participant à la souffrance de cet homme.
Les autres disciples, à l’arrière, semblent pour leur part, indifférents, ils parlent entre eux.
Dans cette guérison, tout se joue par la parole prononcée par Jésus.
Le texte biblique
Lorsque Jésus eut achevé de faire entendre au peuple toutes ses paroles, il entra dans Capharnaüm.
Il y avait un centurion dont un esclave était malade et sur le point de mourir ; or le centurion tenait beaucoup à lui.
Ayant entendu parler de Jésus, il lui envoya des notables juifs pour lui demander de venir sauver son esclave.
Arrivés près de Jésus, ceux-ci le suppliaient instamment : « Il mérite que tu lui accordes cela.
Il aime notre nation : c’est lui qui nous a construit la synagogue. »
Jésus était en route avec eux, et déjà il n’était plus loin de la maison, quand le centurion envoya des amis lui dire : « Seigneur, ne prends pas cette peine, car je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit.
C’est pourquoi je ne me suis pas autorisé, moi-même, à venir te trouver. Mais dis une parole, et que mon serviteur soit guéri !
Moi, je suis quelqu’un de subordonné à une autorité, mais j’ai des soldats sous mes ordres ; à l’un, je dis : “Va”, et il va ; à un autre : “Viens”, et il vient ; et à mon esclave : “Fais ceci”, et il le fait. »
Entendant cela, Jésus fut en admiration devant lui. Il se retourna et dit à la foule qui le suivait : « Je vous le déclare, même en Israël, je n’ai pas trouvé une telle foi ! »
Revenus à la maison, les envoyés trouvèrent l’esclave en bonne santé.
Lc 7, 1-10
Commentaires
Ce texte inspire la prière que nous disons avant la communion :
« Seigneur je ne suis pas digne de te recevoir mais dis seulement une parole et je serai guéri… »
où nous exprimons notre foi, notre humilité.
Ici Luc ne fait pas intervenir directement le centurion qui envoie des notables juifs pour demander de guérir son esclave, (contrairement à ce qui est écrit dans l’évangile de Matthieu (Mt 8, 5-13).)
Jésus accepte la requête et se met en route. Il comprend que le centurion a foi en lui, lui qui avait auparavant manifesté sa bienveillance pour le peuple juif en aidant à bâtir une synagogue. C’est ce que Jésus est venu demander aux Juifs à l’égard des étrangers et des ennemis.
Le centurion aime son esclave qui a de la valeur à ses yeux : amour du pauvre, amour de l’ennemi, vivant témoignage de foi.
A proximité de la maison, une seconde délégation s’approche de Jésus et transmet le message du centurion à la première personne. Le Romain connaît la Loi juive qui interdit à un Juif d’entrer dans la demeure d’un incirconcis.
Le centurion avait entendu parler de Jésus mais pas comme d’un simple guérisseur, puisqu’il dit qu’il n’est pas digne … il demande de dire seulement un mot… : il se reconnaît pécheur, ce qui est un premier signe de conversion. Il montre une confiance totale en Jésus, ce qui témoigne d’une vraie foi.
Il espère en une solution neuve, un geste de guérison, il sait l’inutilité d’un contact direct avec le malade ; car il croit en la puissance de la parole de Jésus, au nom de Dieu, pour accomplir une guérison par la force de l’esprit.
Le texte se termine par une adresse de Jésus à la foule qui le suivait. Il exprime son admiration pour la foi de l’officier romain, alors qu’il n’a pas trouvé une telle foi dans le peuple d’ Israël.
Luc insiste sur le fait que le peuple élu, pour être fidèle à sa vocation, devrait être l’intermédiaire privilégié entre Jésus et les païens pour annoncer le salut de Dieu. Mais, quoi qu’il arrive, la Bonne Nouvelle leur parviendra.