En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Paul devant Festus et Agrippa
Nikolaï Bodarevsky (1850-1921), Paul devant Festus, Agrippa et Bérénice – Musée d’art à Oujhorod, Ukraine
Nikolaï Bodarevsky est un peintre ukrainien du début du 20 e siècle, il fait partie du mouvement des « ambulants » ou « itinérants », un groupe pratiquant la peinture dite réaliste de la toute fin du 19e siècle en Russie.
Nikolai Bodarevsky présente la comparution de Paul à Césarée devant le procurateur de Judée Festus et Agrippa le roi de Judée.
La mise en scène est grandiose. Paul, debout, bien droit, se présente fièrement devant Festus et Agrippa, malgré les chaînes qui entravent ses mains. Il argumente, il est digne, son calme puissant est impressionnant.
Sur une estrade, élevée, couverte d’un beau tapis, trônent Agrippa accompagné de Bérénice, tous deux richement vêtus, les habits ont des couleurs chatoyantes. Mais la lumière est plus orientée vers Paul qui est ainsi superbement mis en valeur.
A leur coté Festus, vêtu d’une toge romaine, écoute attentivement Paul. De nombreux personnages assistent à la scène. Leurs vêtements permettent de distinguer leur appartenance à la société juive ou romaine, toges ou couvre-chefs.
Le texte biblique
Quelques jours plus tard, le roi Agrippa et Bérénice vinrent à Césarée saluer le gouverneur Festus.
Comme ils passaient là plusieurs jours, Festus exposa au roi la situation de Paul en disant : « Il y a ici un homme que mon prédécesseur Félix a laissé en prison.
Quand je me suis trouvé à Jérusalem, les grands prêtres et les anciens des Juifs ont exposé leurs griefs contre lui en réclamant sa condamnation.
J’ai répondu que les Romains n’ont pas coutume de faire la faveur de livrer qui que ce soit lorsqu’il est accusé, avant qu’il soit confronté avec ses accusateurs et puisse se défendre du chef d’accusation.
Ils se sont donc retrouvés ici, et sans aucun délai, le lendemain même, j’ai siégé au tribunal et j’ai donné l’ordre d’amener cet homme.
Quand ils se levèrent, les accusateurs n’ont mis à sa charge aucun des méfaits que, pour ma part, j’aurais supposés.
Ils avaient seulement avec lui certains débats au sujet de leur propre religion, et au sujet d’un certain Jésus qui est mort, mais que Paul affirmait être en vie.
Quant à moi, embarrassé devant la suite à donner à l’instruction, j’ai demandé à Paul s’il voulait aller à Jérusalem pour y être jugé sur cette affaire.
Mais Paul a fait appel pour être gardé en prison jusqu’à la décision impériale. J’ai donc ordonné de le garder en prison jusqu’au renvoi de sa cause devant l’empereur. »
Ac 25, 13-21
Commentaires
Agrippa dont parle Luc ici est Agrippa II (27/28- v92-94 ou 100). Il est le fils d’Agrippa Ier, lui-même petit-fils d’Herode le Grand. Il est fait « tétrarque », se faisait appeler roi, et comme ces rois de la dynastie hérodienne, ne pouvait gouverner que dans la dépendance étroite du pouvoir de Rome.
Festus expose le cas de Paul qui lui pose problème, se justifiant de la conduite menée et permettant à l’accusé de se défendre. Il souligne le débat engendré par la résurrection de Jésus. Mais il se montre embarrassé et évoque sa suggestion d’un jugement à Jérusalem que Paul a rejetée en décidant de faire appel, pour que son cas soit réservé à la juridiction d’Auguste.
Paul, dans les Actes, se contente d’appeler l’empereur César ou Sébaste (Auguste) au v. 21. Au contraire de l’usage courant, le nom de Seigneur est réservé à Dieu. Et Paul, dans ses lettres n’évoque jamais l’empereur. Pour lui, il y a un seul Seigneur, que tous peuvent invoquer, juif ou non, romain ou non, esclave ou citoyen, Paul le rappelle dans sa lettre aux Romains « Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé » (Rm 10,13)
Festus organise une rencontre pleine d’apparat pour que Paul puisse s’exprimer devant Agrippa et sa suite.
Paul profite ainsi de sa citoyenneté romaine, ce qui le conduira à Rome.
L’auteur des Actes fait ainsi de la citoyenneté de Paul un ressort majeur de la marche de la Parole au centre de l’Empire. Il faut souligner que cette citoyenneté est aujourd’hui reconnue mais Paul lui-même n’en parle jamais.
Luc met ainsi en parallèle le procès de Paul devant Festus et Agrippa, et celui de Jésus devant Pilate et Hérode Antipas. Dans les deux cas le Romain qui détient l’autorité reconnaît l’innocence de l’accusé. Les charges ne tiennent pas et aucune condamnation ne s’impose. Paul ne cherche pas à reproduire strictement la vie et la mort de Jésus, mais à vivre de son Esprit dans des circonstances toujours nouvelles.