En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Salomon séduit par les femmes
Sébastien Bourdon, 1616-1671, Salomon sacrifiant aux idoles, 1646-47, Musée du Louvre
Sebastien Bourdon est un peintre français protestant du 17e siècle.
Après une enfance difficile, en 1634, il s’est retrouvé à Rome où il a pu admirer les œuvres de Poussin, Claude Lorrain ou encore du Caravage.
Très vite il se fait connaître en pastichant leurs œuvres avec talent. Il réalise aussi nombre de « bambochades » (scènes de genre représentant crûment la vie populaire), qui pourtant s’avérèrent des oeuvres bien construites, sans expression vulgaire, avec des coloris très raffinés.
Il quitte Rome, fait un détour par Venise et revient en France en 1637, après un séjour qui influencera grandement son œuvre. Il introduit dans ses peintures un esprit poétique, une nouvelle conception de l’espace, des arrières plans lumineux et des rythmes sinueux s’opposant aux lignes strictes des architectures. De beaux coloris jouant avec diverses tonalités de bris et de bleus.
A Paris il réalise le may des Orfèvres (tableau offert par la corporation pour le 1er mai) à la cathédrale Notre Dame de Paris : le tableau du Martyr de saint Pierre où il introduit des éléments baroques. Cela lui apportera la célébrité.
Le tableau que nous regardons était destiné au dessus de cheminée d’un hôtel parisien devenu aujourd’hui le siège de la Banque de France.
Salomon ayant sacrifié aux dieux païens est représenté agenouillé devant un autel que surmonte la représentation sculptée d’une déesse. Tout autour de lui se pressent quelque- unes de ses nombreuses femmes.
Pour souligner leur rôle néfaste, Bourdon montre au centre du tableau, l’une d’entre elles, qui dans un geste d’approbation, désigne la divinité au roi agenouillé.
La toile est construite en oblique, les figures sont souples, les coloris sont doux et la lumière est diffuse
Le texte biblique
Salomon vieillissait ; ses femmes le détournèrent vers d’autres dieux, et son cœur n’était plus tout entier au Seigneur, comme l’avait été celui de son père David.
Salomon prit part au culte d’Astarté, la déesse des Sidoniens, et à celui de Milcom, l’horrible idole des Ammonites.
Il fit ce qui est mal aux yeux du Seigneur, et il ne lui obéit pas aussi parfaitement que son père David.
Il construisit alors, sur la montagne à l’est de Jérusalem, un lieu sacré pour Camosh, l’horrible idole de Moab, et un autre pour Milcom, l’horrible idole des Ammonites.
Il en fit d’autres pour permettre à toutes ses femmes étrangères de brûler de l’encens et d’offrir des sacrifices à leurs dieux.
Le Seigneur s’irrita contre Salomon parce qu’il s’était détourné du Seigneur Dieu d’Israël. Pourtant, celui-ci lui était apparu deux fois,
et lui avait défendu de suivre d’autres dieux ; mais Salomon avait désobéi.
Le Seigneur lui déclara : « Puisque tu t’es conduit de cette manière, puisque tu n’as pas gardé mon alliance ni observé mes décrets, je vais t’enlever le royaume et le donner à l’un de tes serviteurs.
Seulement, à cause de ton père David, je ne ferai pas cela durant ta vie ; c’est de la main de ton fils que j’enlèverai le royaume.
Et encore, je ne lui enlèverai pas tout, je laisserai une tribu à ton fils, à cause de mon serviteur David et de Jérusalem, la ville que j’ai choisie. »
1 R 11,4-13
Commentaires
La liturgie nous offre cette semaine de parcourir de règne de Salomon.
Après la fameuse rencontre avec la reine de Saba, au cours de laquelle la sagesse de Salomon est mise en valeur, viennent les jours de sa vieillesse. La sagesse dans l’Ancien Testament évoque l’intelligence et le discernement dans la soumission à la volonté de Dieu. Salomon incarnera la sagesse dans toute la tradition juive, jusqu’à l’époque de Jésus. Dans cette sagesse de Salomon, la reine de Saba avait perçu la puissance de Dieu qui agit en lui.
Aujourd’hui nous découvrons Salomon, vieil homme, qui s’est détourné du Seigneur.
Il désobéit à la Loi, à la suite de ses femmes, des étrangères idolâtres, qui pervertissent son cœur.
Il avait demandé et obtenu un cœur sage, un cœur qui écoute. Sans doute en avait-il senti le besoin pour conduire les autres mais non pas pour se conduire lui-même. Mais il n’a pas gardé ce grand cœur.
Ses nombreuses femmes le séduisent et le tournent vers leurs idoles. Une image très négative de la femme est proposée ici ; elle correspond à une mentalité patriarcale bien représentée dans la Bible : Eve séduit Adam, les femmes des rois israélites introduisent des cultes idolâtres de leur propre pays. Il faut lui opposer, ailleurs dans la Bible, une toute autre vision, positive celle-là, de la femme : celle d’abord des « matriarches », Sarah, Rebecca et Rachel, celles surtout de Ruth, Esther, Judith. Le Nouveau Testament lui donnera toute sa place : rappelons la rencontre de Jésus avec la femme syro-phénicienne, cette étrangère dont la confiance forcera l’admiration de Jésus et finalement le convaincra ! Nous lisons ce récit aujourd’hui dans l’évangile de Marc (Mc 7, 24-30). La femme invite Jésus à sortir des frontières du monde juif, la mission s’étend toujours plus loin, aux périphéries !
Salomon est condamné par ses propres paroles. Il avait enseigné aux autres : Par-dessus tout, veille sur ton cœur, c’est de lui que jaillit la vie. » (Pr 4,23), mais il a dévié. Son royaume sera plus tard donné à un de ses généraux, son fils ne conservant qu’une seule tribu, celle de Juda et Benjamin.