En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Ouvrir le livre aux sept sceaux
Apocalypse flamande, l’adoration de l’agneau, folio 6, 15e siècle, BNF
L’Apocalypse flamande est un manuscrit de l’Apocalypse de Jean enluminé, daté du début du 15e.
c’est le seul manuscrit de l’Apocalypse du Moyen Age écrit en néerlandais et enluminé. Il contient 23 illustrations en pleine page .
L’origine du manuscrit est inconnue, ni lieu de fabrication, ni commanditaire. D’après la langue et le style, il a du être composé en Flandres entre 1400 et 1410. Il a été acquis par la Bibliothèque Nationale de France en 1827.
Le livre est composé de 22 chapitres et les miniatures rassemblent sur une même page les différents épisodes évoqués dans chacun de ces chapitres. L’iconographie est complexe, sans doute inspirée d’un théologien.
Le folio que nous regardons illustre le chapitre 5 de l’Apocalypse que nous lisons aujourd’hui.
Deux mandorles dominent cette enluminure :
Dans la supérieure, Dieu avec une couronne et un nimbe d’or, est assis sur le trône et montre le livre à l’agneau.
Dans la mandorle inférieure,est représenté l’agneau avec sept yeux et sept cornes courbées.
L’agneau tient le livre ouvert, les sceaux brisés en pendent comme des signets. Saint Jean guidé par le vieillard, touche la mandorle.
Les autres vieillards ont été peints sur le fond bleu foncé, ton sur ton, et seules leurs couronnes d’or et leurs instruments de musique aussi en or sont visibles.
Le texte biblique
J’ai vu, dans la main droite de celui qui siège sur le Trône, un livre en forme de rouleau, écrit au-dedans et à l’extérieur, scellé de sept sceaux.
Puis j’ai vu un ange plein de force, qui proclamait d’une voix puissante : « Qui donc est digne d’ouvrir le Livre et d’en briser les sceaux ? »
Mais personne, au ciel, sur terre ou sous la terre, ne pouvait ouvrir le Livre et regarder.
Je pleurais beaucoup, parce que personne n’avait été trouvé digne d’ouvrir le Livre et de regarder.
Mais l’un des Anciens me dit : « Ne pleure pas. Voilà qu’il a remporté la victoire, le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David : il ouvrira le Livre aux sept sceaux. »
Et j’ai vu, entre le Trône, les quatre Vivants et les Anciens, un Agneau debout, comme égorgé ; ses cornes étaient au nombre de sept, ainsi que ses yeux, qui sont les sept esprits de Dieu envoyés sur toute la terre.
Il s’avança et prit le Livre dans la main droite de celui qui siégeait sur le Trône.
Quand l’Agneau eut pris le Livre, les quatre Vivants et les vingt-quatre Anciens se jetèrent à ses pieds. Ils tenaient chacun une cithare et des coupes d’or pleines de parfums qui sont les prières des saints.
Ils chantaient ce cantique nouveau : « Tu es digne, de prendre le Livre et d’en ouvrir les sceaux, car tu fus immolé, rachetant pour Dieu, par ton sang, des gens de toute tribu, langue, peuple et nation.
Pour notre Dieu, tu en as fait un royaume et des prêtres : ils régneront sur la terre. »
Ap 5, 1-10
Commentaires
En cette fin d’année liturgique il nous est offert de lire le livre de l’Apocalypse Nous en lirons deux extraits les semaines a venir.
La puissante imagerie symbolique de l’Apocalypse a toujours inspiré les enlumineurs, les peintres, et les grandes tapisseries du Moyen Age jusqu’à nos jours. Elle n’en reste pas moins surprenante et souvent difficile à comprendre.
Il faut d’abord rappeler que l’Apocalypse inaugure une réouverture du ciel, le monde de Dieu, qui est à nouveau accessible à certains hommes Le prophète, Jean, voit une porte qui s’ouvre dans le ciel, et ce qu’il lui est permis de contempler est une ample et majestueuse liturgie céleste. Elle célèbre la victoire finale de Dieu sur les forces du mal, victoire obtenue par la mort de l’Agneau, le Christ, relevé et accueilli devant Dieu dans la gloire. La liturgie déploie dans le ciel sous forme de chants et de louange, le drame qui est en train de se jouer sur la terre, et dont elle affirme la fin glorieuse de salut. Que les croyants gardent confiance !
Ici apparaît un élément nouveau : un livre écrit au dehors et au dedans et scellé de 7 sceaux. Les significations du livre-rouleau sont multiples, mais la présence d’une écriture dehors et dedans et le chiffre 7 appliqué au livre et à l’Agneau désignent la plénitude et la perfection. Il s’agit bien du dessein de Dieu en tant qu’il est parvenu à son terme.
Qui peut assumer l’accomplissement plénier du dessein de Dieu sinon l’Agneau, celui qui a accepté de donner sa vie, et de mourir pour que la vie triomphe de la puissance destructrice des forces du mal et de la mort ? C’est l’Agneau seul qui va ouvrir le livre, et ses sept sceaux, autrement dit, c’est lui qui va donner la signification de toutes les catastrophes de l’histoire humaine jusqu’à leur terme final (le septième sceau), car il les a traversées et il en a été vainqueur.
Seul l’Agneau, parole définitive et parfaite de Dieu, peut ouvrir le livre et en donner la sens ultime. Pourtant un petit livre sera confié au voyant, pour qu’il puisse révéler aux hommes sous forme énigmatique et codée les souffrances qui les attendent mais aussi l’espérance d’un salut déjà chanté dans les cieux.