En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Dieu miséricordieux dans l’Ancien Testament, 1
“Son nom est miséricorde”
Rembrandt, 1606-1669, Moïse brisant les tables de la loi, 1659, Gemäldegalerie, Staatliche Museen, Berlin
En 1659 Rembrandt représente Moïse en fureur prêt a briser les tables de la loi contre un rocher.
C’est sur une montagne qu’a lieu la rencontre de Dieu et de Moïse, rencontre qui dura quarante jours et quarante nuits. Le prophète descend du mont Sinaï brandissant les tables de la Loi reçues directement du Créateur. A son retour il trouve le peuple devenu infidèle, en adoration devant le veau d’or. Et dans sa fureur il brise les tables sacrées. Il retournera sur le Sinaï pour obtenir de nouvelles tables pour que le peuple hébreu retrouve sa foi en Dieu et expérimente la miséricorde de Dieu qui pardonne à son peuple ses infidélités.
Cette œuvre date de la dernière période de Rembrandt, durant laquelle sa peinture devient de plus en plus allusive, elle ne définit pas mais suggère.
Le fond est vague, montagneux, désertique et brûlant, aux confins du monde terrestre, un espace qui n’est plus tout a fait physique mais déjà mental et où souffle l’Esprit. Par le jeu des tons qui se superposent et se fondent , Moïse semble jaillir de la montagne, montagne lui-même.
Sa stature est imposante, surhumaine, autoritaire, il est investi du message de Dieu.
Mais le visage de Moïse ne reflète pas le geste de colère, il exprime plutôt une grande tristesse, il a pitié de son peuple. Son visage est illuminé, n’y a t-il pas une connotation de triomphe ? Les deux épisodes bibliques sont exprimés en une seule image.
Dieu dira à Moïse qu’il est tendre et miséricordieux, plein d’amour et de vérité, qu’il gardera sa fidélité malgré les erreurs de son peuple.
Le texte biblique
Le Seigneur dit à Moïse : « Taille deux tables de pierre, semblables aux premières : j’écrirai sur ces tables les paroles qui étaient sur les premières, celles que tu as brisées.
Sois prêt pour demain et monte dès le matin sur la montagne du Sinaï. Tu te placeras là pour moi, au sommet de la montagne.
Que personne ne monte avec toi ; que personne même ne paraisse sur toute la montagne. Que même le petit et le gros bétail ne soient pas conduits au pâturage devant cette montagne. »
Moïse tailla deux tables de pierre semblables aux premières. Il se leva de bon matin, et il gravit la montagne du Sinaï comme le Seigneur le lui avait ordonné. Il emportait les deux tables de pierre.
Le Seigneur descendit dans la nuée et vint se placer là, auprès de Moïse. Il proclama son nom qui est : Le Seigneur
Il passa devant Moïse et proclama : « le Seigneur, le Seigneur, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité,
qui garde sa fidélité jusqu’à la millième génération, supporte faute, transgression et péché, mais ne laisse rien passer, car il punit la faute des pères sur les fils et les petits-fils, jusqu’à la troisième et la quatrième génération. »
Aussitôt Moïse s’inclina jusqu’à terre et se prosterna.
Il dit : « S’il est vrai, mon Seigneur, que j’ai trouvé grâce à tes yeux, daigne marcher au milieu de nous. Oui, c’est un peuple à la nuque raide ; mais tu pardonneras nos fautes et nos péchés, et tu feras de nous ton héritage. »
Le Seigneur dit : « Voici que je vais conclure une alliance. Devant tout ton peuple, je vais faire des merveilles qui n’ont été créées nulle part, dans aucune nation. Tout le peuple qui t’entoure verra l’œuvre du Seigneur, car je vais réaliser avec toi quelque chose d’extraordinaire.
Ex 34, 1-10
Commentaires
Qu’est-ce que la miséricorde, pour vous ?
Étymologiquement « être miséricordieux » signifie ouvrir son cœur au mystère. Regardons l’attitude du Seigneur : la miséricorde, c’est l’attitude divine qui consiste à ouvrir les bras, c’est Dieu qui se donne et qui accueille, qui se penche pour pardonner. Jésus a dit qu’il n’était pas venu pour les justes, mais pour les pécheurs. Il n’est pas venu pour ceux qui sont en bonne santé, qui n’ont pas besoin d’un médecin, mais pour les malades. On peut donc dire que la miséricorde est la carte d’identité de notre Dieu . Dieu de miséricorde, Dieu miséricordieux. J’ai toujours été frappé en lisant l’histoire d’Israël telle qu’elle est racontée dans la Bible, dans mle chapitre XVI du livre d’Ézéchiel. Israël y est comparé à une enfant à laquelle on n’a pas coupé le cordon ombilical ; on l’a laissée souillée de sang, puis on l’a jetée en pleine campagne. Dieu la voit se débattre dans son sang. Il la lave, l’oint d’huile, l’habille ; plus tard, une fois qu’elle a grandi, il la pare de soie et de bijoux. Mais elle, infatuée de sa propre beauté, se prostitue, non contre de l’argent, mais en offrant des cadeaux à ses amants. Et pourtant, Dieu n’oubliera pas son alliance et la préférera à ses sœurs aînées, afin qu’Israël se souvienne et éprouve de la honte (Ez 16,63) lorsqu’on lui pardonnera ce qu’elle a fait.
Pour moi, c’est une des révélations les plus grandes : tu seras toujours le peuple élu, tous tes péchés te seront toujours pardonnés. C’est ainsi : la miséricorde est indissociable de la fidélité de Dieu. Saint Paul l’explique très bien dans sa 2e épître à Timothée (2,3) « si nous sommes infidèles, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même ». On peut renier Dieu, on peut pécher contre lui, mais Dieu ne peut se renier lui-même , Lui, reste fidèle.
Pape François, Le nom de Dieu est miséricorde , Robert Laffont/Presses de la Renaissance, 2016