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Centre d'enseignement de théologie à distance

Malheureuse es-tu Corazine !

Très riches heures du duc de Berry, le mois de décembre. (det) 1410/1416, Musée Condé, Chantilly

 

Les très riches heures du duc de Berry est un livre d’heures commandé par le duc Jean de Berry. La commande a été faite aux frères Paul, Jean et Herman de Limbourg vers 1410-1411. Inachevé à la mort des trois peintres et de leur commanditaire en 1416, le manuscrit fut complété par un peintre anonyme dans les années 1440. Les couleurs magnifiques et vives ont été réalisées à l’aide des pigments les plus rares et les plus précieux : le lapis lazuli, le vermillon, la laque rose fabriquée à base de bois de Brésil.

 

Les images du calendrier sont les plus connues, elles représentent à la fois des scènes paysannes, ou aristocratiques de la vie quotidienne, et des éléments d’architectures, des villes, des châteaux.

A l’horizon le château de Vincennes, avec son donjon central et ses tours est le château royal achevé par Charles V pour y entreposer son trésor : c’est avec le Louvre l’autre forteresse qui défend Paris. Il domine par sa tour verticale la scène de chasse à courre, au moment de l’hallali qui symbolise la force physique et morale du roi.

 

Mais le château est séparé de la scène par un épais rideau d’arbres feuillus. Il est étranger à ce qui se passe au premier plan.

 

Là est présentée une scène de vénerie, la curée au moment où un des chasseurs achève de sonner l’hallali. Les chiens dépècent le sanglier, bête alors très redoutée et particulièrement nuisible puisqu’elle ravageait les récoltes et les enclos des paysans.

 

Les personnages ont des visages maussades, aux yeux révulsés. L’atmosphère de l’ensemble reste empreinte de violence et de cruauté.

Le texte biblique

 Alors Jésus se mit à faire des reproches aux villes où avaient eu lieu la plupart de ses miracles, parce qu’elles ne s’étaient pas converties :

 « Malheureuse es-tu, Corazine ! Malheureuse es-tu, Bethsaïde ! Car, si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, ces villes, autrefois, se seraient converties sous le sac et la cendre.

 Aussi, je vous le déclare : au jour du Jugement, Tyr et Sidon seront traitées moins sévèrement que vous.

 Et toi, Capharnaüm, seras-tu donc élevée jusqu’au ciel ? Non, tu descendras jusqu’au séjour des morts ! Car, si les miracles qui ont eu lieu chez toi avaient eu lieu à Sodome, cette ville serait encore là aujourd’hui.

 Aussi, je vous le déclare : au jour du Jugement, le pays de Sodome sera traité moins sévèrement que toi. »

 

 

Mt 11,20-24

Commentaires

Parlant des villes riveraines du lac de Galilée Jésus utilise le même style que les prophètes de l’Ancien Testament qui invectivaient les orgueilleuses cités païennes menaçant le Peuple de Dieu.

 

Les villes concernées, trois villes de Galilée, ont été visitées par Jésus qui y a fait des miracles, et pourtant elles ne se sont pas converties. Ces trois noms résonaient à l’époque comme des lettres de noblesse, réputation liée surtout à l’opulence du commerce. Elles sont maintenant placées sous la menace du jugement.

 

La construction du passage est organisée en deux vagues symétriques.

Tout d’abord Corazine, toute proche de Capharnaüm, et Bethsaïde, située face à Corazine, de l’autre coté du Jourdain. Jésus affirme que Tyr et Sidon, villes païennes, auraient fait pénitence devant ses miracles, ainsi elles subiront un jugement moins sévère que les villes juives impénitentes.

 

Puis Jésus s’en prend à Capharnaüm, sa propre ville, de manière encore plus sévère. Jésus fait référence au sort réservé au roi impie de Babylone « Mais te voici descendu au séjour des morts, au plus profond de la fosse » (Is 14,13-15). Et Jésus va encore plus loin, en comparant Capharnaüm à la ville de Sodome, ville païenne maudite entre toutes. Jésus parle comme un prophète ; il n’exprime pas de hargne personnelle envers ces villes, il ne les condamne pas, mais il pleure sur elles et sur leur aveuglement.

 

A la manière des grands prophètes d’Israël, Jésus utilise des paroles violentes et injurieuses contre l’incrédulité des proches, en regard de la prise de conscience de ceux qui au départ étaient étrangers aux promesses. On entend aussi résoner dans ce texte le conflit qui opposera les premières générations chrétiennes venues du paganisme au monde juif refusant de reconnaître le Christ.

 

Ce passage fait aussi un lien entre les miracles, c’est à dire les « actes de puissance » et l’appel à croire au Royaume. Ce sont des faits extraordinaires réalisés par Dieu, par son Envoyé. Mais ils ne violent pas la liberté humaine qui peut les refuser. Jésus lui même constate ce refus.

Saint Jérôme rapproche ce mystère d’aveuglement du mystère de notre propre relation à Dieu. Les villes sur lesquelles Jésus pleure sont habitées par ses amis, ses familiers, chacun de nous !

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