En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Autorité de Jésus
Matteo da Milano, actif entre 1492 et 1523, initiale O d’un missel, Jésus exorcisant, 1515-1525, Cleveland Museum of art, Ohio, USA
Cet artiste milanais du 16e siècle s’est spécialisé dans l’illustration de manuscrits ecclésiastiques, ses commanditaires étant les familles les plus importantes de l’époque , la maison d’Este et de Ferrare (1504-1512) les Médicis de Florence, les Orsini de Rome et les Della Rovere, ducs d’Urbin ainsi que le pape Léon X.
C’était un artiste innovant et éclectique.
Son style est caractérisé par ses décorations de bordures innovantes, combinant les traditions de l’antiquité classique, flamande et celles de l’Europe du Nord. Il avait recours aux grotesques et autres décorations antiques : fleurs et motifs variés proches de la nature.
Ses couleurs sont vives, raffinées.
Le dessin à l’intérieur de l’initiale est techniquement précis et conceptuellement ludique ! Les détails sont minutieusement rendus.
Entre les deux groupes de personnages, un paysage fait d’arbres, de rochers, d’herbes et de lac au lointain.
D’un côté Jésus auréolé, vêtu d’un beau vêtement violet qu’il retient d’une main, bénit le malade. Son regard est calme, bienveillant et à la fois ferme, opposé à la furie qui est manifeste dans le regard du possédé. Derrière Jésus, est représentée la tête d’un disciple.
De l’autre côté un groupe d’hommes. Le possédé vêtu d’une robe verte qui laisse sa jambe dénudée. Son regard est effrayé. Un petit diable est parti dans le haut de l’illustration. Deux juifs richement habillés soutiennent le malade et l’un d’eux lève la main, saisi d’étonnement.
Le texte biblique
Jésus descendit à Capharnaüm, ville de Galilée, et il y enseignait, le jour du sabbat.
On était frappé par son enseignement parce que sa parole était pleine d’autorité.
Or, il y avait dans la synagogue un homme possédé par un esprit démoniaque,
qui se mit à crier d’une voix forte : « Ah ! que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais fort bien qui tu es : le Saint, le Saint de Dieu ! »
Jésus l’interpella vivement : « Silence ! Sors de cet homme ! » Alors le démon le jeta par terre devant tout le monde et sortit de lui sans lui faire aucun mal.
Tous furent effrayés, et ils se disaient entre eux : « Quelle est cette parole ? Car il commande avec autorité et puissance aux esprits mauvais, et ils sortent ! »
Et la réputation de Jésus se propagea dans toute la région.
Lc 4, 31-37
Commentaires
Dans ce chapitre Luc s’attache à décrire la puissance thaumaturgique exercée par Jésus à Capharnaüm. Quatre épisodes sont relatés dont celui que nous lisons aujourd’hui, l’exorcisme.
Tout d’abord Luc rappelle que Jésus enseigne dans les synagogues avec une force extraordinaire qui étonne les auditeurs, et l’exorcisme n’est qu’une des manifestations de cette parole puissante. Enseignements et guérisons sont étroitement liés.
Jésus libère donc un homme de l’esprit mauvais qui le possédait.
Cela est un peu déroutant pour nous aujourd’hui, mais cela est très significatif pour l’Eglise dont fait partie Luc. La société établissait un lien étroit entre les maladies et les forces maléfiques, ainsi l’exorcisme était une pratique totale qui s’attaquait aux causes du mal. Les Grecs parlent de démons, les juifs d’esprits impurs, mauvais, ce qui souligne bien l’opposition de ces effets maléfiques et de l’Esprit Saint.
Luc parle d’un « homme possédé par un esprit démoniaque ». Cela indique les contraintes intérieures qui entravent souvent l’homme, sans que celui-ci ait la force de se libérer seul. Les miracles opérés par Jésus sont un moyen de manifester la puissance de Dieu, sa victoire sur Satan, une annonce de la venue de son Règne. Ils veulent être des incitations pressantes à la conversion. Mais cela ne peut se faire que dans la foi .
Le récit de Luc se déroule selon le schéma classique : le démon reconnaît l’exorciste et se rebiffe. Il ne se contente pas de nommer Jésus de Nazareth et de marquer ses distances de façon hostile. Il demande si l’heure ultime où doit s’écrouler le monde des forces du mal n’a pas sonné. Il sait qui est réellement Jésus et le nomme « le saint de Dieu ».
Puis l’exorciste profère une menace ou un ordre. Alors le démon sort de façon manifeste : l’homme est projeté à terre devant les spectateurs.
Le récit se termine par la description de l’impression produite sur les assistants : une crainte religieuse qui conduit à l’interroger sur l’origine de cette parole efficace.
Le lecteur sait qu’il s’agit de l’Esprit dont Jésus a reçu l’onction.