En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
L'Annonciation
Antonello da Messina (1430-1479), Annonciation, 1470, Musée de Palerme
Ce tableau titré « Annonciation » soulève une interrogation : est-ce une représentation du « oui » de Marie qui vient d ’écouter les paroles de Gabriel, et qui accepte donc d’être “la servante du Seigneur” ou une annonciation qui échappe aux représentations traditionnelles, puisque l’ange est absent du tableau ? Comme la Lettre aux Hébreux qui insiste sur le «me voici » du Seigneur, Antonello da Messina évoque celui de Marie en évitant toute possibilité narrative ; pour cela il cadre le tableau à mi-corps. Il parvient ainsi à condenser dans cette toile différents moments du récit de l’Annonciation, en tout centrant sur l’acceptation de Marie et sa disponibilité.
La composition est sobre: un fond sombre sur lequel s’inscrit l’ovale parfait du visage, ceint d’un voile en forme de triangle.
Marie lit un livre de prière, posé sur un pupitre en bois délicatement ouvragé : s’agit-il de la Bible ? On pourrait imaginer que Marie lit le psaume 40… Le blanc du livre brille par contraste avec les couleurs plus ternes du voile bleu de Marie et du brun sombre du fond du tableau.
Marie a donc été surprise en pleine lecture ; ses yeux sont interrogateurs : quelque chose d’insolite, se passe, de fait, « hors champ ». Le peintre a-t-il occulté l’« infigurable » présence de l’Ange pour ne retenir que la réaction de la Vierge ?
Les mains sont impressionnantes, croisées sur la poitrine en signe de respect, mais aussi pleines de caractère, de vie, d’énergie, elles semblent s’entr’ouvrir, comme la bouche pour accueillir ce qui vient.
Antonello da Messina s’inscrit évidemment dans la tradition des peintres qui veulent rendre le bouleversement psychologique de Marie, l’étonnement, la peur, l’acceptation , le respect, mais aussi la joie de celle qui s’apprête à dire « me voici », tel que le déploie la lettre aux Hébreux.
Le texte biblique
Il est impossible, en effet, que le péché soit enlevé par le sang des animaux. Aussi, en entrant dans le monde, le Christ dit, d'après le Psaume : Tu n'as pas voulu de sacrifices ni d'offrandes, mais tu m'as fait un corps. Tu n'as pas accepté les holocaustes ni les expiations pour le péché ; alors, je t'ai dit : Me voici, mon Dieu, je suis venu pour faire ta volonté, car c'est bien de moi que parle l'Écriture. Le Christ commence donc par dire : Tu n'as pas voulu ni accepté les sacrifices et les offrandes, les holocaustes et les expiations pour le péché que la Loi prescrit d'offrir. Puis il déclare : Me voici, je suis venu pour faire ta volonté. Ainsi, il supprime l'ancien culte pour établir le nouveau. Et c'est par cette volonté de Dieu que nous sommes sanctifiés, grâce à l'offrande que Jésus Christ a faite de son corps, une fois pour toutes.
Hébreux 10,4-10
Commentaires
Le jour de l’Annonciation, nous lisons naturellement l’évangile de Luc qui situe clairement l'événement dans le temps et dans l'espace: “Le sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, du nom de Nazareth, à une vierge fiancée à un homme du nom de Joseph, de la maison de David; et le nom de la vierge était Marie” (Lc 1, 26-27). La lecture de cet évangile est précédée de la lettre aux Hébreux. Ce texte permet d'écouter une conversation entre le Père et le Fils sur le dessein de Dieu de toute éternité. “Tu n'as voulu ni sacrifice ni oblation; mais tu m'as façonné un corps. Tu n'as agréé ni holocaustes ni sacrifices pour les péchés. Alors j'ai dit: Voici, je viens […] pour faire, ô Dieu, ta volonté” (He 10, 5-7). La Lettre aux Hébreux dit que, obéissant à la volonté du Père, le Fils vient parmi nous pour offrir le sacrifice qui dépasse tous les sacrifices offerts lors de la précédente Alliance. Son sacrifice est le sacrifice éternel et parfait qui rachète le monde.
L’auteur de la lettre aux Hébreux interprète le Psaume 40, 7-9. Ces textes nous mettent face au mystère des deux “me voici”, celui du Fils et celui de la Mère, qui se reflètent l'un dans l'autre et forment un unique Amen à la volonté d'amour de Dieu. Comme Jésus , Marie sait que la meilleure manière de rendre grâce à Dieu, ce n’est pas de lui offrir des sacrifices, c’est de se rendre disponible pour faire sa volonté.
Le dessein divin est révélé graduellement dans l'Ancien Testament, en particulier dans les paroles du prophète Isaïe, qui sont lues dans la première lecture de ce jour : “C'est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe: Voici, la jeune femme est enceinte, elle va enfanter un fils et elle lui donnera le nom d'Emmanuel” (7, 14). Emmanuel signifie « Dieu avec nous ». Par ces paroles, est préfiguré l'événement unique qui devait s'accomplir à Nazareth dans la plénitude des temps.
En définitive, ce « me voici », c’est la seule réponse que Dieu attend du cœur de l’homme ; c’est la réponse des vrais serviteurs de Dieu