En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Esclave de la justice

Asservissement de prisonniers nubiens. Temple d’Abou Simbel, Égypte
L’esclavage n’est pas socialement accepté dans nos cultures occidentales. Par contre, dans le monde de la Bible, l’asservissement était une pratique courante.
Les esclaves étaient représentés en bas reliefs sur les temples. À genou, tenus par des cordes, menacés par le fouet. Ils s’avancent vers le souverain qui les a faits esclaves. Ils apparaissent comme de beaux hommes forts, la tête haute.
D’un point de vue linguistique, l’hébreu n’a pas de mot pour distinguer le serviteur de l’esclave. Le mot « èbèd » exprime une relation de dépendance sans plus de précision. On utilise ce même terme pour toutes les relations de service
Aux temps bibliques, les personnes devenaient souvent esclaves lors des guerres. Les prisonniers qui n’étaient pas exécutés finissaient leur vie comme esclaves
Mais religieusement, la symbolique de l’esclave/serviteur portait souvent une connotation positive.
Les Israélites, eux-mêmes libérés des Égyptiens, se disaient serviteurs/esclaves de Dieu (Lv 25,55). Ils appartenaient à Dieu, leur maître.
Le Nouveau Testament met en scène plusieurs paraboles où l’on retrouve des esclaves. Il met en garde contre diverses formes d’esclavages : être asservi par le péché (Rm6,6), par les éléments du monde (Ga 4,3) ou par l’argent (Lc16,13). Par contre, d’autres passages affirment qu’il faut être au service de la justice (Rm 6,18) comme nous le lisons aujourd’hui.
Paul n’affirmera-t-il pas lui-même qu’il est l’esclave de Jésus Christ lorsqu’il se présentera au début de la lettre aux Romains (1,1).
Le texte biblique
J’emploie un langage humain, adapté à votre faiblesse. Vous aviez mis les membres de votre corps au service de l’impureté et du désordre, ce qui mène au désordre ; de la même manière, mettez-les à présent au service de la justice, ce qui mène à la sainteté.
Quand vous étiez esclaves du péché, vous étiez libres par rapport aux exigences de la justice.
Qu’avez-vous récolté alors, à commettre des actes dont vous avez honte maintenant ? En effet, ces actes-là aboutissent à la mort.
Mais maintenant que vous avez été libérés du péché et que vous êtes devenus les esclaves de Dieu, vous récoltez ce qui mène à la sainteté, et cela aboutit à la vie éternelle.
Car le salaire du péché, c’est la mort ; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus notre Seigneur.
Rm 6, 19-23)
Commentaires
Ce passage fait suite à l’enseignement de Paul sur la liberté que Dieu en son Fils Jésus Christ offre au croyant : elle consiste à être libéré de la puissance du mal, puissance de mépris de l’autre, de mensonge et de repli sur soi. Par sa fidélité au dessein de Dieu, Jésus a réajusté les êtres humains à la volonté de Dieu. Dieu leur a rendu justice en se les réconciliant. La justice de Dieu est ainsi présentée comme une puissance de vie qui ajuste à la volonté aimante de Dieu, et crée ainsi un comportement éthique nouveau.
Ainsi les lecteurs sont exhortés à mettre désormais leurs corps «(« leurs membres »), ce qui désigne tout leur être, à disposition de cette justice, qui est amour et miséricorde.
Cette vie nouvelle est alors comparée à l’esclavage ancien avec ses conséquences funestes. Elle est donc comprise comme un esclavage nouveau aux effets concrets infiniment meilleurs. Si la soumission au péché conduisait à des actes de destruction de l’autre et de soi la soumission à la justice nouvelle conduit à la vie avec Dieu, la vie selon sa bonté et sa paix. Paul, à ce stade, n’hésite pas à dire : « vous êtes devenus les esclaves de Dieu ».
Paul conclut par un contraste entre le salaire versée par le Péché personnifié, la mort, et la gratuité de vie éternelle prodiguée en Jésus le Christ, notre Seigneur.