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Centre d'enseignement de théologie à distance

La femme syro-phénicienne

 Jean Colombe 1430- 1493  , La femme syro phénicienne, enluminure, Les Heures de l'Année Liturgique. Les Très Riches Heures du Duc de Berry, environ 1485-89, fol 164
 
Cette miniature tirée des Heures de l'année liturgique des Très riches heures du duc de Berry, est réalisée par Jean Colombe.
Elle est composée de deux représentations, indiquant les deux attitudes de Jésus.
En haut  le Christ se détourne de la femme syro-phénicienne qui l'implore, malgré le mépris des apôtres. Dans une maison à droite on voit une femme qui tente de réconforter la jeune fille couchée accablée par la maladie.
En bas la femme est à genoux devant Jésus qui est touchée par sa persévérance et sa foi ; il fait alors un geste de consentement et les apôtres semblent désormais partager les sentiments de leur maître par le geste de la main
 
Les poses de tous les personnages sont naturelles, différentes pour chacun, les expressions bien rendues , les couleurs sont vives et se complètent dans une belle harmoinie.
Le village est dépeint avec précision, la maison à colombages, le jardin de la place, la ferme, le pigeonnier et l'église avec son porche extérieur.
 
Jean Colombe est réputé pour les paysages de montage dont nous avons ici un magnifique exemple.
Il s'est surpassé dans les paysages nous offrant une des visions les plus concrètes dont nous disposons aujourd'hui de la campagne médiévale, plus précisément savoyarde.
 

Le texte biblique

 
 
24 En partant de là, Jésus se rendit dans la région de Tyr. Il était entré dans une maison, et il voulait que personne ne sache qu'il était là ; mais il ne réussit pas à se cacher.

25 En effet, la mère d'une petite fille possédée par un esprit mauvais avait appris sa présence, et aussitôt elle vint se jeter à ses pieds.

26 Cette femme était païenne, de nationalité syro-phénicienne, et elle lui demandait d'expulser le démon hors de sa fille.

27 Il lui dit : « Laisse d'abord les enfants manger à leur faim, car il n'est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens. »

28 Mais elle lui répliqua : « C'est vrai, Seigneur, mais les petits chiens, sous la table, mangent les miettes des petits enfants. » Alors il lui dit :

29 « A cause de cette parole, va : le démon est sorti de ta fille. »

30 Elle rentra à la maison, et elle trouva l'enfant étendue sur le lit : le démon était sorti d'elle.
 

Marc 7, 24-30
 

Commentaires

  
Ce récit bien connu évoque la mission de Jésus vers les païens.
Il se situe dans l’évangile de Marc à l’intérieur de la section couvrant les chapitres 6 à 8 que l’on appelle souvent : « section des pains ». Elle comporte une série de récits qui tous concernent le pain partagé et enrichissent une réflexion sur le pain eucharistique partagé dans les communautés chrétiennes.
Jésus est allé dans la région de Tyr, ville de Phénicie (aujourd'hui Sour, ville du sud du Liban), au-delà des frontières du territoire juif.
Une femme vient demander à Jésus de guérir sa fille habitée par un  esprit mauvais. Marc souligne qu'elle est païenne, de nationalité syro-phénicienne.
 
Après le récit de la première multiplication des pains située au chapitre précédent, nous avons ici encore une parole de Jésus sur le pain, qui est l'image du salut. Alors que Jésus refuse d’abord de partager le pain des enfants (les juifs) et de le donner aux petits chiens (les païens), l’attitude de la femme le convainc de donner aussi aux petits chiens, c'est à dire d’intervenir en faveur d’une païenne !
On se rappelle le grand débat de l'Église primitive, auquel Paul s'est heurté toute sa vie, autour des problèmes de nourriture. Le grand obstacle à la fraternisation entre les chrétiens d'origine juive et ceux d'origine païenne est que ceux d'origine juive ont continué à respecter les observances alimentaires de la tradition rabbinique. Les questions de « pur » et « impur » sont l'objet de discussions avec les scribes et les pharisiens… les païens ne sont pas fréquentables ! La Loi de Moïse interdit toujours les contacts avec eux.

On remarque que Jésus ne voulait pas qu'on sache qu'il était là. L'étrangère fait donc preuve d'une bien grande audace en venant aborder un rabbi juif. Elle voudrait que Jésus expulse de sa fille un démon.
Au début Jésus refuse d'accéder à la demande de cette mère. Mais la femme conteste le caractère exclusif du salut de Dieu, sans pourtant remettre en cause la priorité d'Israël. C'est le dialogue entre la femme et Jésus qui importe dans ce passage, au-delà de la guérison de la jeune fille à distance !
La femme fait preuve d'une admirable confiance qui montre à Jésus que les étrangers savent recueillir, fût-ce des miettes, de la nourriture offerte au peuple élu. Et Jésus ne s'y trompe pas, il voit dans ce propos une véritable profession de foi, et il n'hésite pas à donner un signe que le Royaume de Dieu est là.

Ici Jésus renverse les barrières qui séparaient deux mondes, juif et païen ; il laisse entendre que le pain dont il veut rassasier les foules, s'il est d'abord destiné à Israël, sera un  jour partagé à tous, même à ceux qui viennent de loin. La foi des étrangers, leur accueil de la Bonne Nouvelle, leur confère le droit de prendre part au banquet messianique.
L'Évangile ne connait pas de frontières, la foi ouvre à tous les hommes la source du salut.
 
 
 
 

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