En lien avec l'Institut Catholique de Paris et la Conférence des Évêques de France
Elie et Elisée
“L'ascension du Prophète Elie”, Icône russe – début XVIII° siècle
Cette icône est comme une petite « bande dessinée » des principaux épisodes de la vie du prophète Elie.
Le regard est d’abord attiré par le haut de l’icône, la scène entourée d’un nuage rouge, et vers laquelle tout semble monter
Elle raconte comment le prophète Elie fut enlevé au ciel sur un char conduit par de multiples chevaux, et comment Elie a remis à son disciple Elisée son manteau afin de lui transmettre ses pouvoirs spirituels.
L'iconographie byzantine reprend le thème du dieu antique du Soleil qui voyageait sur un quadrige de feu. Le prophète Elie apparaît au-dessus de la montagne dans un cercle ou un ovale de feu, avec un carrosse tiré par quatre chevaux. Le nuage rouge entourant le char est considéré comme une particularité des icônes russes.
Au centre de l'icône est représentée la traversée du Jourdain par Elisée, héritier d’Elie, qui sépare les eaux en frappant le fleuve avec le manteau qu’Elie a laissé tomber en partant.
Dans le bas de l’icône, d’autres scènes de la vie d’Elie sont évoquées :
En bas à gauche de l'icône la vision de l'ange qui vient réconforter le prophète dans le désert. Selon le texte biblique, l'ange a apporté à Elie de l'eau et du pain en lui disant: “Lève-toi, bois et mange, une longue route est devant toi.”
Elie est également représenté devant la caverne qui lui a servi d'abri pendant sa retraite dans le désert. Appuyé sur sa canne, il médite.( I Rois, 19, 4-13) : c’est devant cette caverne que le Seigneur Dieu passera devant le prophète et se révèlera à lui « dans un souffle de fin silence ».
Le texte biblique
Voici comment le Seigneur enleva Élie au ciel dans un ouragan.
Ce jour-là, Élie et Élisée étaient partis de Guilgal. Élie dit à Élisée : « Arrête-toi ici ; moi, le Seigneur m'envoie à Béthel. » Élisée répliqua : « Par le Seigneur qui est vivant, et par ta vie, je ne te quitterai pas. » Ils allèrent tous deux à Béthel. Les frères-prophètes de Béthel sortirent à la rencontre d'Élisée et lui dirent : « Sais-tu bien qu'aujourd'hui le Seigneur va enlever ton maître au-dessus de ta tête ? » Élisée répondit : « Oui, je le sais. Taisez-vous ! » Élie lui dit de nouveau : « Arrête-toi ici ; moi, le Seigneur m'envoie à Jéricho. » Élisée répliqua : « Par le Seigneur qui est vivant, et par ta vie, je ne te quitterai pas. » Ils allèrent tous deux à Jéricho. Les frères-prophètes de Jéricho s'approchèrent d'Élisée et lui dirent : « Sais-tu bien qu'aujourd'hui le Seigneur va enlever ton maître au-dessus de ta tête ? » Élisée répondit : « Oui, je le sais. Taisez-vous ! » Une troisième fois, Élie dit à Élisée : « Arrête-toi ici ; moi, le Seigneur m'envoie au Jourdain. » Mais Élisée répliqua : « Par le Seigneur qui est vivant, et par ta vie, je ne te quitterai pas. » Ils continuèrent donc tous les deux. Cinquante frères-prophètes, qui les avaient suivis, s'arrêtèrent à distance, pendant que tous deux se tenaient au bord du Jourdain. Élie prit son manteau, le roula et en frappa les eaux, qui s'écartèrent de part et d'autre. Ils traversèrent tous deux à pied sec. Pendant qu'ils passaient, Élie dit à Élisée : « Dis-moi ce que tu veux que je fasse pour toi avant d'être enlevé loin de toi. » Élisée répondit : « Que je reçoive une double part de l'esprit que tu as reçu ! » Élie reprit : « Tu demandes quelque chose de difficile : tu l'obtiendras si tu me vois lorsque je serai enlevé loin de toi. Sinon, tu ne l'obtiendras pas. » Ils étaient en train de marcher tout en parlant lorsqu'un char de feu, avec des chevaux de feu, les sépara, et Élie monta au ciel dans un ouragan. Élisée le vit, et il se mit à crier : « Mon père !…Mon père !… Char d'Israël et ses coursiers ! » Puis il cessa de le voir. Il saisit ses vêtements et les déchira en deux. Il ramassa le manteau qu'Élie avait laissé tomber, il revint et s'arrêta sur la rive du Jourdain. Avec le manteau d'Élie, il frappa les eaux, mais elles ne s'écartèrent pas. Élisée dit alors : « Où est donc le Seigneur, le Dieu d'Élie ? » Il frappa encore une fois, les eaux s'écartèrent, et il traversa.
2 R ,1-14
Commentaires
Ce texte traite de la succession d’Elie ; dans un texte précédent 1 R 19,16-21 qui constituait la vocation d’Elisée, Elie avait reçu l’ordre d’oindre Elisée comme prophète « à sa place », expression utilisée pour exprimer la succession dynastique des rois. Le texte d’aujourd’hui parle de la passation de pouvoirs. Les deux textes tentent de représenter la suite historique des prophète comme une lignée d’envoyés de Dieu ayant tous la même mission : annoncer la parole du Seigneur à son peuple, et lui donner ainsi la vie.
Les deux hommes ont passé du temps ensemble, mais on ne sait pas grand chose, on apprend seulement en 2R 3,11, que Elisée lavait les mains d’Elie, un des services que le disciple rend à son maître. Elie et Elisée sont ensemble le jour où Elie doit quitter cette terre (ce qui est représenté symboliquement par la traversée du Jourdain).
Il semble qu’Elie veuille être seul pour ce départ, comme il voulait être seul pour mourir dans le désert. Il cherche à éloigner Elisée : « Arrête-toi ici ; moi, le Seigneur m'envoie à Béthel ». Mais Elisée reste attaché à son maître et refuse de le quitter. Le contraste du caractère des deux hommes est particulièrement manifeste dans ce récit.
Mais, comme s’il s’agissait d’une épreuve, la désobéissance aux ordres du prophète est récompensée : « demande ce que tu veux ».
Elisée demande à Elie qu’il lui donne une double part de son esprit : il sait sa tâche future bien difficile, il ressent son insuffisance devant la grandeur des besoins. Seule la puissance de Dieu, agissant dans et par ses serviteurs, peut venir au-devant des détresses de son peuple. Jésus parlait des «fleuves d’eau vive» qui couleraient du sein de ceux qui croiraient en lui ; il disait cela de l’Esprit, qui n’était pas encore venu, « parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié» (Jean 7:38-39). La venue de l’Esprit est donc liée à la glorification du Seigneur. Symboliquement, il en est de même pour Élisée. S’il voit Élie enlevé aux cieux, si ses regards et son cœur sont attirés en haut, il recevra la double mesure de l’Esprit ; sinon, cela ne sera pas.
Elie est emporté par un vent de tempête ; le char sépare les deux hommes et escorte Elie pour son entrée au ciel Elisée alors ramasse son manteau : il est bien désigné comme l’héritier d’Elie, il a obtenu une double part de son esprit.
L’épisode suivant raconte comment Elisée va le vérifier : il prend le manteau d’Elie pour traverser le Jourdain à pied sec. Cette scène rappelle l’entrée de Josué en Terre promise (Jos 3-4), et naturellement aussi la traversée de la Mer Rouge par Moïse (Ex 14)
Ainsi le jeune prophète a repris «le manteau» ; il a renoué avec la tradition de « salut » d’Israël. Le passage des générations s’est effectué selon Dieu.